Ploc. Ploc. Ploc. Fait la pluie. Ploc. Ploc. Ploc. Fait la pluie sur les pavés de la cour. La tête enfouie sous mon pull vert, sans capuche parce que sinon c'est pas marrant, et désormais détrempé, je me faufile jusqu'aux écuries. Arrivée au chaud, l'endroit certainement réchauffé par le lourd souffle des chevaux. D'un pas... mouillé, je me dirigeais vers le box de ma protégée. Coup de cœur sur les photos, la mistinguette. Une petite shetland, alezane. Oui-oui, je sais. Impossible de la monter. Meubon. j'vais pas m'arrêter à ça quand même...


La fameuse petite demoiselle se trouvait dans son box. Grand, le box, vu sa taille... Shetland jusqu'au bout, dites-moi ! Entendant mon pas bruyant s'arrêter devant le box, je vis une petite tête rousse passer avec difficultés le haut de la porte du box pour me regarder de cette petite bouille trooooooop mignonne qui m'avait déjà faite craquer auparavant. Lui laissant une petite caresse le temps d'aller chercher mes brosses, elle m'accueillit trois secondes plus tard avec autant d'amour et de ferveur.


Je poussais la porte, obligeant bien malgré moi la petite chose que j'avais adoptée à se pousser. Elle n'eut pas l'air de m'en tenir rigueur, et vint réclamer toujours plus de caresses. Pour éviter de lui faire peur, je m'agenouillais, histoire d'être plus ou moins à sa hauteur. Avec une caresse sur le chanfrein, je fis les présentations nécessaires.
- Bonjour, Loula ! Alors, moi c'est Anmélia. Tu es contente d'avoir quitté le refuge pour ce petit box "cosy" ? Tu m'en as tout l'air, en tous cas. On va apprendre à faire connaissance, qu'est-ce que tu en dis ?


Oui, je sais, je sais, c'est certainement pas elle qui va me répondre. C'est là l'un de mes plus gros défaut : parler continuellement aux animaux. Pas qu'aux animaux, d'ailleurs, mais les humains n'ont pas le bon sens de me laisser terminer mes loooongs monologues. Au moins, avec Loula, pas de surprises ! Même si je passais mes journées à lui ressasser toujours la même chose, j'étais certaine qu'elle ne m'en voudrait pas, et qu'elle viendrait réclamer toujours autant de câlins, si ce n'est plus. Je l'appréciais décidément beaucoup, cette demoiselle...

- Un petit pansage, ça te dit ? je suis certaine que tu me caches des merveilles sous cette robe d'hiver encore toute emmêlée !


Pas de réponse bis. Je fis semblant de comprendre et de prendre ça pour un oui. Quoi qu'il en soit, elle en avait besoin. Sa robe rousse virait au marron à quelques endroits. Une petite étrille vissée (oui, certes, pas vissée, mais on s'comprend hein) sur la main, je commençais les mouvements circulaires nécessaires. Les derniers poils d'hiver tombaient sur le sol paillé. Elle tournait souvent sa tête vers moi, et je lui répondais par une foule de caresses. Décidément, elle était vraiment attachante. Peut-être un peu trop, même... je mis pratiquement une demi-heure juste pour l'étrille.


Lui offrant ce que j'annonçais comme "une dernière caresse", je passais le bouchon et la brosse douce en évitant de trop regarder ses petits yeux noisettes un peu trop suppliants à mon goût. Je crois que c'est quand j'ai voulu lui nettoyer le museau et le contour des yeux que j'ai craqué. Une autre caresse vint rejoindre les précédentes. Quel cœur d'artichaut je fais ! Pour un peu, j'en aurais honte. Mais fort heureusement, il n'y a que Loula pour voir mes faiblesses...


Un bon coup de cure-pied rapide (ses sabots sont si petits !)et un coup de brosse dans les crins, ma petite puce rousse ressemblait enfin à un shetland. Bon, avec encore pas mal de poils d'hiver, certes... Mais je mis ça sur le compte du printemps qui s'était fait longtemps attendre. Si elle était restée un peu au pré, il était normal que son poil soit resté plus longtemps que d'ordinaire.


Sur ces sages et scientifiques pensées qui ne me ressemblaient pas, je jetais un coup d’œil à ma montre. Déjà 17h ! Cela faisait presque 2h que j'étais avec ma petite protégée, je n'avais même pas vu le temps passer ! Estimant qu'elle était assez propre, je finis rapidement par nettoyer son box. J'allais chercher une brouette et une pelle, et j'enlevais les crottins de sa litière de paille. Puis, pour regarnir, j'ajoutais une demi-botte de paille. Le box propre, je lui donnais sa ration de foin, et je la quittais sur encore mille et une caresses. Pour un peu, je l'aurais presque emmenée dans mon lit...

Je me lève avec difficultés ce matin. C'est certainement dû au fait que je sois affalée sur le canapé, réveillée par le top 50 sur W9. Sympa, le réveil. J'ai du, comme à mon habitude, m'endormir devant la télé. Sauf que je ne me suis pas réveillée pour aller finir ma nuit dans un lit correct. Bon, pas grave. Titubant un peu, je me dirige vers la cuisine et m'enfile un grand verre de jus Pomme-Citron. D'habitude, je coupe avec de l'eau, mais là, vu que je ne bois pas de café, l'amertume de ma boisson est nécessaire. Je déchire l'emballage d'une barre chocolatée, le jette, et monte enfiler une quelconque tenue pour sortir voir mes chevaux.


Ce matin, je ne sais pas vraiment quoi faire. Je décide d'abord de passer voir Loula. La voyant comme d'habitude lever haut-haut-haut sa petite tête pour pouvoir me voir, j'ai une illumination. Je vais rétrécir sa porte, comme ça elle pourra voir le monde extérieur sans se tendre comme un élastique sur ses petites pattes ! Ne voulant pas salir un box en la transvasant, je lui met un licol et l'accompagne jusque dans la cour de l'écurie. La première herbe a fait son apparition, et voyant qu'elle lorgne dessus avec gourmandise, je détache la longe et décide de la laisser en liberté. Petite comme elle est, elle ne peut pas faire beaucoup de dégâts, et de toutes façons je vais la surveiller en bricolant dans la cour.


Je rentre à nouveau, et sort la porte de ses gonds. Bien qu'elle soit relativement lourde, j'arrive par on-ne-sait quelle opération du saint esprit à la porter jusque dans la cour, et à l'appuyer contre la barre d'attache de façon à ce qu'elle reste debout. Du coin de l’œil, je surveille la petite tache rousse qui ne s'est pas éloignée d'un pas, toujours occupée par le même carré de verdure. Avec cette petite bouche, tu m'étonnes qu'elle n'aille pas très vite !
Je me souvenais avoir laissé dans un placard du bureau toutes sortes d'outils de bricolage. Je récupère un tournevis, un marteau et une scie à métaux après avoir fourragé pendant cinq bonnes minutes. Dieu que je suis bordélique !


Dans la cour, une porte de box toute seule et une shetland gourmande. Magnifique tableau bucolique et... un peu apocalyptique quand même. On pourrait se demander quelle tempête-de-la-mort-qui-tue aurait pu mettre la porte là. Meubon. Pour le moment, personne n'est venu me le demander, alors bon... J'allais chercher la petite ponette pour la présenter face à la-dite porte. Elle se fit un peu prier, aussi recommençais-je à lui parler.

- Tu sais Loula, je fais ça pour toi hein ! Alors, voyons voir... Si j'enlève 2 planches, tu verrais bien le dehors... Oui, c'est ça, 2 planches ! Parce que 3, j'aurais peur que tu passes par-dessus. Bon, c'est bon, je te lâche, va rejoindre ta coupine verte !

La petite chipie prend le petit trot, et s'éloigne à nouveau. Elle est sage, quand même. Peu de chevaux auraient à peine profité de cette liberté, la plupart se seraient outrageusement enfuis. Mais pas elle. Breeeeeeef. Armée de mon tournevis (enfin, armée, armée... tout est relatif hein. Je pense pas pouvoir blesser quelqu'un à coup de tournevis. Enfin, quoique...). Donc, armée de mon tournevis, je commence à m'attaquer aux premières vis qui retiennent la première planche de bois au cadre de métal. Il y en a 4, deux de chaque côté. Mine de rien, c'est vachement costaud, une porte de box ! Je met une bonne demi-heure à retirer juste la première planche. Et une autre demi-heure à retirer la deuxième.

Jetant un coup d’œil vers Loula qui a enfin fini son carré d'herbe et s'est attaqué à celui un peu plus loin, je m'empare de ma scie à métaux. je dois laisser la partie gauche du cadre en métal, vu que le gond y est soudé. Je dois laisser la partie droite également, vu que le loquet y est soudé. Mais je peux scier à ras de ces deux éléments pour retirer la partie supérieure du cadre. Cette fois-ci, ça va vachement plus vite que retirer les planches. Cependant, une fois le métal retiré posé au sol, je me rend compte que le bout reste coupant et dangereux.

Retournant dans mon bureau pour trouver une éventuelle solution, j'avise une vieille bougie posée sur le bureau. Voilà la solution ! Je me met à chercher un chalumeau, et une fois l'objet trouvé, je retourne veiller sur Loula et sa porte. Postée au-dessus de l'endroit coupant, j'allume la bougie et je laisse tomber la cire. Petit à petit, un pâté blanchâtre se crée, justement où je le voulais. Je laisse sécher le premier côté le temps de faire l'autre, puis j'admire mon bricolage. La cire ayant séché, c'est tout lisse. Mission accomplie !

Appelant Loula, je ramène la porte dans l'écurie et, après avoir galéré pour la remettre sur ses gonds, je la fait pivoter, fière de mon travail. Qui a dit que les femmes ne savaient pas bricoler ? Je range vite-fait mes outils en vrac dans mon bureau, sachant pertinemment que je mettrais un bail à les retrouver la prochaine fois. Mais tant pis, la flemme de les ranger maintenant ! Je ramène donc Loula dans son box, petite ponette repue d'herbe de printemps.

Au début, elle ne fait pas mine de remarquer la différence. Quand je ferme la porte, elle vient me voir, toute contente. Bon, j'ai bien galéré, mais au moins elle est contente ! Voyant qu'il est déjà 14h, et que mon estomac crie famine, je vais lui chercher son repas, que je glisse dans la mangeoire. Il va juste falloir que je fasse attention à cette porte, maintenant, vu que je ne la vois plus très bien ! Faudrait pas que je me la prenne dans les pieds, quand même...

Après avoir passé ma matinée à l'Arche, cherchant un futur compagnon pour Loula, je repartis la tête remplie de noms. Ça allait encore être difficile, tout ça... Je rejoignis donc mes écuries d'un bon pas. Marcher m'aérait la tête et me faisait du bien. J'arrivais dans les écuries et me dirigeait directement vers mon bureau. Je remplis mes poches de carottes et j'attrapais un paquet de chips. Mon estomac criait famine, mais je n'avais ni l'envie ni le courage de retourner manger quelque chose chez moi. Aussi me contentais-je de grignoter sur le chemin vers le box de Loula.

Par-dessus la petite porte de box, je vis sa petite tête couleur caramel émerger, le toupet clairsemé de paille. Un grand sourire éclaira mon visage. Deux semaines après son arrivée ici, elle semblait si heureuse de me voir ! Elle donnait rapidement son amitié à qui savait prendre relativement soin d'elle, cette petite bouille... Je lui offris une caresse, une carotte, et un licol. Enfin, je lui passais le licol. Ça, elle ne le mangeait pas encore...

Je l'emmenais dans la cour, l'attachait, et passait un coup de bouchon sur tout son petit corps. La poussière enlevée, je pris une brosse pour démêler ses longs crins, et par la même occasion enlever la paille. Une fois la petite demoiselle fin prête, je repris la longe en lui annonçant.
- Allez Loula ! Je vais te laisser un peu de liberté dans la carrière ! Tu devrais me remercier de cette délicate attention, ma petite demoiselle...


>>> Carrière.


La pluie s'étant invitée, j'étais vite rentrée, la petite shetland me suivant en trottinant. Ses petites jambes tricotaient à ma suite, résonnant sur les pavés de la cour. Je la rentrais dans l'écurie pour l'attacher devant son box. Je ne voulais pas la rentrer, avec tout le sable dont elle s'était couverte. Sable rendu collant par la pluie, bien évidemment. Sinon, vous me direz, c'est franchement pas marrant...
Attrapant donc une étrille, je m'attaquais au dos de ma petite demoiselle. Les plaques de sable jonchaient le sol à peine dix minutes plus tard. J'avais eu de la chance, il n'avait pas eu le temps de sécher sur la robe. Je passais tout de même un bouchon et une brosse douce afin de bien retirer tous les petits grains mesquins. Sa crinière eu le droit à un nouveau nettoyage. Avec elle, ma brosse n'allait pas tenir longtemps ! Ses jolis crins couleur lait au caramel étaient certes magnifiques, mais aussi très longs, et très faciles à emmêler... Mais bon, je n'allais tout de même pas me focaliser là-dessus ! Elle était si belle, ma petite Loula...


Ma jolie alezane enfin redevenue propre, je la rentrais dans son box. Puis, maniaque de naissance, j'allais chercher un balai et une pelle afin de ramasser tout le sable répandu au sol. J'en profitais pour récurer rapidement devant les deux boxes occupés, ramassant la paille et les copeaux qui s'étaient sournoisement glissés sous la porte. Puis, vidant ma belle sur le tas de fumier, je revins vers Loula, lui donnant sa ration de granulés dans la mangeoire.
Voyant qu'elle ne mangeait pas, une carotte apparu comme par miracle dans ma main. Carotte que bien évidemment elle avala, avant d'attaquer goulûment son repas. Je devais m'être faite avoir, là, non ?