Le van arrivait et je me précipitais dehors. Une fois dehors je n'entendais aucun bruit dans le van. Ce dernier arrivait doucement en roulant comme s'il était vide. Je pris d'abord panique en pensant que le cheval était mort ou qu'ils n'avaient pu le transporter mais dans ce cas ils seraient venus en voiture. J'en conclus donc ensuite que le poulain avait été dopé afin que le trajet soit fait dans les meilleures conditions. Je fulminais contre cette idée mais je me calmais bien vite me rappelant qu'ils évitaient juste leur mort et celle du poulain. Le van se stoppa dans l'écurie et je leur souris en leur serrant la main. Mon premier cheval à sauver. L'homme rentra dans le van et sortit le poulain sans problème. Ce dernier avait le regard hagard et marchais d'un pas lent et détendu. Je le regardais soucieuse mais rapidement le conducteur me rassura m'expliquant que c'était à cause des calmants. Je soupirais doucement et conduisit le poulain jusqu'à ce box tout propre et fait de ce matin. Je caressais doucement son chanfrein puis le laissais dans le box. Il était tellement calme, pas du tout comme on me l'avait décrit.

La paperasse finie et le van repartit, il était déjà 12h. Je m'avançais vers le box et lui donna à manger. Il n'y toucha pas. Encore trop dans les vapes il n'avait pas fait attention à moi et je me permis donc de le regarder. J'avais suivi un vétérinaire équin et je connaissais donc les soins de base. Il était maigre, trop maigre. Sa robe était terne et pas belle en faite. Lorsque je vis ses jambes je cru pleurer. De fines entailles étaient présentes un peu partout. Je glissais doucement mon doigts contre l'une d'entre elles et le poulain enleva doucement sa jambe. Je n'insistais pas. Je pris de la crème et revint lui en mettre un petit peu. C'était de la crème cicatrisante à base de Graines De Fenugrec. Je bandais ensuite ses jambes avec cette crème. Ensuite je le massais doucement avec du Néroli afin de le détendre une fois qu'il commencerait à reprendre conscience des choses. Mais ce n'était pas encore le cas. Je m'assis dans le box attendant son "réveil".

Ce ne fut pas très long. Une heure ou deux. Au passage j'avais rajouté du fois de morue dans sa nourriture afin qu'il soit plus attiré par son mélange. Doucement la transformation se fit. Il commença doucement à être plus agité, à bouger les membres un à un, à reprendre possession de son corps. Il fut d'abord intrigué par ma présence et me regarda longuement. Puis il fit quelques pas en avant, quelques pas en arrière. Il mordilla les bandes qui ne tombèrent pas. J'eus peur de les avoir trop serrés alors je bougeais dans sa direction pour y toucher mais soit je fus trop vive soit il était trop craintif, quoi qu'il en soit il fit un bond sur le côté. Je fulminais contre moi même et me replaçais dans mon coin. Je ne bougeais plus les mains toujours pleines de Néroli. Le petit poulain fit deux-trois pas pour sentir l'odeur de mes mains et avec une infime douceur et très lentement, j'avançais ses dernières pour toucher ses naseaux. Il recula la tête et je souris. C'était un cheval très curieux, ce qui était assez normal pour son âge. A quatre pattes, je sortis du box pour le laisser tranquille. Au bout d'une demi-heure je compris qu'il était totalement revenu à lui avec son cri puissant et strident. Il ne comprenait plus rien. Je m'avançais donc jusqu'au box, me mit accroupie et ouvrit la porte. Il recula vivement au fond du box. Je soupirais et m'assis devant le box, l'interdisant de sortir et l'obligeant à s'habituer à ma présence. Le petit cheval noir tremblait de tous ses membres et j'avais de la peine pour lui. Au bout de quelques heures à nous observer ainsi je capitulais. Le cheval n'avait fait aucun pas, aucun mouvement et tremblait toujours autant. J’espérais juste qu'il toucherait à sa mélasse où j'avais aussi rajouté des carottes afin de l'appâter. Et j'espérais aussi qu'il ne toucherait pas à ses bandes afin qu'il puisse cicatriser. J'abandonnais tout effort pour établir un lien sachant pertinemment qu'il ne fallait pas le brusquer. Je m'en allais donc.

Le matin se levait et je sortais de chez moi avec précipitation avant d’aller au travail. Le poulain était encore endormi dans son box et je ne fis aucun bruit en m’approchant de la porte. Il s’était allongé et se détendait enfin. Avec dépits je remarquais qu’il n’avait toujours pas touché à sa ration. Je soupirais doucement et il se réveilla d’un coup. Il se leva avec rapidité avant de se réfugier au fond de son box. Je souris de tristesse et rentrais accroupie dans le box. Je m’assis près du saut, pris un bout de carotte et le tendis au poulain. Il n’avança pas. Je le posais à quelques mètres de moi. Il n’y toucha pas. Je soupirais doucement. Je me relevais, et sortais afin de lui donner du foin avant de partir au travail. J’enlevais aussi la mélasse que je refis car elle ne devait plus être bonne. Je pris exactement les mêmes ingrédients rajoutant de la menthe ainsi que plus de pommes et de fois de morue. Je priais pour qu’il y touche et posa le seau dans le box avant de partir.

Je rentrais du travail et me dirigeais immédiatement au box du jeune poulain. Il était là debout, sans rien faire, sans bouger, sans toucher à sa paille ou à son foin. Mais la quantité de foin et de ration avait diminué. Il avait donc mangé ce qui était une bonne chose. Ce n’avait pas été énorme mais c’était déjà une victoire. Je m’avançais doucement vers le poulain, un licol a la main. Il se jeta au fond alors qu’avant de le voir il n’avait pas bougé. Quelle idiote j’étais. Néanmoins je voulais le désensibilisé et la nourriture ne l’attirerait pas moi. Il ne restait donc plus que la curiosité. Je m’assis dans un coin du box, le licol a la main. Il ne bougea pas et continua de me regarder. Le temps passa et je laissais tomber. Je posais le licol dans un coin, pris le seau et sortis du box. Je mangeais puis retournait dans les écuries pour nourrir mon poulain. Il était près du licol et le mordillait. Je le regardais attendrit, il ne faisait pas attention à ma présence. Il semblait jouer avec ce licol. Je remplissais le seau et la mélasse du matin et je pris un ballon un peu dégonflé. Vu comment il s’était ennuyé toute la journée je ne voulais pas que ça recommence. Me voyant ouvrir le box il lâcha le licol comme s’il était confus et il se déplaça pour garder une distance entre nous deux. Je posais la ration puis le ballon dans le coin opposé au licol. Je fis un bisou au loin et murmurais doucement son prénom. Puis je me levais et retournais chez moi pour la nuit.

Je me levais angoissée comme tous les matins. Il avait pu se passer n’importe quoi chez ce cheval et dans l’écurie. C’est donc un peu angoissé que je dévalais les escaliers pour rejoindre l’écurie. Trois jours qu’il était là, à peine, et je passais mes nuits à ne dormir que d’un œil. J’arrivais dans l’écurie alors que le soleil se levait à peine. Je resserrais mon écharpe autour de mon cou. Passant la tête par la porte je vis le poulain dans le box qui se leva d’un coup sec. Bon il n’était toujours pas très rassuré par ma présence. Mais… Il avait touché à sa ration ! J’étais si contente. Il avait mangé la moitié du mélange. Il commençait sûrement à reprendre vie. J’entrais dans le box qui commençait à être bien sale et prit le seau. Je nettoyais ce dernier puis le rempli à nouveau du même mélange car le premier lui avait bien plu. A un moment par contre il faudrait tout de même que je pense à l’habituer à une nourriture plus « normale » que ce mélange. Mais pour le moment le but était de lui faire reprendre un peu de poids. Je regardais ces jambes toujours « emprisonnées » dans les bandes. Je soupirais. Je devais les enlever maintenant et ça n’allait pas être de tout repos. Et il fallait aussi penser à comment nettoyer le box donc comment le faire aller au pré pour que le box soit libre. Je posais le seau près du poulain et allais manger en même temps que lui dans ma cuisine afin de le laisser tranquille.

Je revins quelques minutes plus tard après avoir pris ma douche et m’être un peu plus habillée. Le poulain avait un peu mangé mais pas assez de mon point de vue. Tant pis de toute façon le seau resterait dans le box durant la journée. Je m’approchais du petit cheval accroupie la paume tendue vers lui. J’avais mis de la lavande sur mes mains pour le calmer. Ses vertus apaisantes étaient reconnues. Il recula de quelques pas. Je ne bougeais pas. C’était à lui de venir. Bon j’usais de la ruse toute de même en sortant une carotte de ma poche. Oui oui ce n’était pas très bien mais je devais aller au travail bientôt. Il s’approcha doucement, intrigué. Curiosité et peur se bataillaient dans son esprit je le sentais mais je ne bougeais pas et m’armais d’une patience infinie. Puis du bout des lèvres il attrapa la carotte. Je m’avançais doucement vers lui et il ne bougea pas. J’inspirais. Le moindre faux pas et il s’en irait. Doucement et avec lenteur, j’enlevais la première bande. Puis toujours accroupie, je m’avançais vers son postérieur où je fis de même. Je repassais devant lui toujours accroupie et lui donnait une autre carotte. Il était sage, étonnement sage. Je réussis à défaire les deux dernières bandes avant qu’il ne se dérobe au fond du box. Il devait comprendre que ce que je faisais était dans son intérêt. Le ballon et le licol étaient toujours dans son box afin qu’il s’amuse durant la journée et je sortais du box. J’allais donc au travail apaisée.

Durant la pause du midi j’avais eu le temps de monter un plan afin de le faire passer au pré. En plus cette petite sortie lui ferait un grand bien. Ces blessures allaient bien mieux grâce à la crème. Lorsqu’il aurait plus confiance en moi je pourrais en remettre mais c’était déjà mieux. Je rentrais donc et avec ma voiture je fis une barrière entre le box et le pré. Puis avec une longe, je fis une autre barrière. J’ouvrais le box et m’en allais. Doucement le petit cheval fit quelques pas dans le box puis vers la sortie et c’est au petit trop qu’il rejoignit le pré grand ouvert. Là il brouta quelques herbes puis se roula avant de me voir et donc de faire une jolie ruade alors que je fermais le pré. Il s’élança au fond du pré au galop m’arrachant un sourire. Une fois la porte bien fermée je pus nettoyer son box que je curai complètement afin de lui faire bénéficier d’un peu plus de confort. Je replaçais les objets pour qu’il continue à s’y habituer. Bon maintenant il s’agissait de le faire rentrer au box. Je remis les barrières de fortune comme pour l’aller et j’ouvrais le pré. Le poulain était au bout et ne semblait pas vouloir rentrer. Bien. Je m’avançais dans le pré doucement. Arrivée à sa hauteur je cru que je l’avais. Mais au moment où ma main touchait son encolure, il se rebuta et galopa à l’autre bout. Impassible, sourire aux lèvres, je m’avançais vers lui. Il me fit le même cou avec une mini levade. Je souris de plus belle. Ce poulain était vraiment incroyable. Il était impossible à prédire. Au bout d’une demi-heure de jeu, il rentra au box, tête relevée et queue aussi, fier. Il faisait tellement arabe à ce moment là. On aurait dit qu’il se foutait complètement de moi. Je souris et ferma le box. Avant de le laisser la nuit, je refis un mélange que je plaçais dans son box. Il me regarda alors que je rentrais, le licol dans sa bouche. Heureusement que ce n’en était pas un dont je tenais.

Le mercredi je ne travaillais pas. Je passerais donc toute ma journée avec lui. Je me levais comme tous les matins et me dirigeais vers la sellerie où je fis mon mélange. Encore une fois il avait mangé la moitié de sa ration. Peut être n’avait il pas besoin de plus ? Je remplissais tout de même le seau en entier au cas où il aurait faim. Je posais le seau dans le box et m’accoudais à la porte fermée. Il ne bougea pas, sentant toujours ma présence. La peur n’était toujours pas complètement partie et le passé ne s’oublierait pas si facilement. Je m’en allais donc déjeuner et me préparer afin qu’il s’autorise à manger. Une bonne demi-heure plus tard je revenais et vus qu’il n’avait mangé qu’un quart. Il mangerait sûrement le reste après. J’ouvrais la porte et me plaçais devant, assise. J’avais tout mon temps et de la patience. Je lui tournais le dos et attendis. C’était à lui de venir maintenant. De longues minutes passèrent. J’avais sans cesse envi de tourner de l’œil, voir s’il avait bougé mais je n’en avais pas le droit, un moindre mouvement signifiait que je lâchais prise. Et j’étais sûre qu’il n’avait pas bougé car je n’avais rien entendu. En même temps un poulain de ce poids ne faisait pas grand bruit. Je commençais à fatiguer de ma position et ma patience avait des limites mais je me concentrais et pour rester ainsi je repassais mon anime préféré dans ma tête. Anime qui avait donné le nom de mon écurie. Puis un bruit de paille écrasé me fit trembler de surprise. Avait-il réellement fait un pas vers moi ? Je ne bougeais toujours pas. C’était à lui de venir complètement. Je réalisais trop tard que j’avais oublié de mettre un peu de lavande sur mes mains. Dommage, l’encens aurait pu faciliter le contact. Mais il arrivait. Après environ une heure à rester dans le box à l’attendre, le poulain fit un deuxième pas. Incroyable. J’avais du mal à y croire mais sa curiosité était donc plus forte que sa peur. Je souris. Quelques minutes après, son petit bout de nez touchait timidement mon dos. Avec une infime délicatesse je me retournais et posais ma main contre son chanfrein. Il ne bougea pas. Je caressais cet endroit et son bout de nez puis lui tendis une carotte. Il ne rechigna pas devant la nourriture et ne s’en alla pas au fond du box. Je remontais le chanfrein pour le caresser sur le front entre les deux yeux. Il recula doucement sans grande volonté. Il devait juste être un peu effrayé de cette main. Je la déplaçais donc au niveau de l’encolure avec lenteur. Arrivé à son encolure, je le massais au niveau de la crinière. Au départ il fut en alerte par ce nouveau mouvement et fit un nouveau pas en arrière. Je ne cédais pas, il m’avait accordé sa confiance. Enfin un petit peu de sa confiance. Je continuais donc de le masser, agenouillée dans la paille. Dream gardait sa tête haute et restait en alerte mais je continuais. Petit à petit il se détendait. Je le sentais, sa tête était plus basse et il respirait à longs traits. Au bout d’une demi-heure, le poulain était presque endormis, ses yeux se fermaient et s’ouvraient à nouveau. Il était complètement détendu. Tout doucement, je sortais du box, le laissant profiter de ce calme. Je pris la voiture et me rendis chez mon vétérinaire habituel.

Mr Nova était un jeune homme spécialisé dans les bovins et les chevaux. Il avait commencé son métier il y avait peu de temps et était présent lorsque le poulain était arrivé. Je lui faisais entièrement confiance car je travaillais déjà avec lui pour mon emploi. Lorsqu’il me vit la surprise fut grande mais il était aussi très content que je fasse appel à lui. Je lui expliquais que je commençais à avoir une vraie relation avec le poulain et qu’il était certain qu’il pourrait l’examiner. J’avais besoin d’un avis professionnel pour les blessures. Il décida donc de venir le lendemain soir avec de la crème spéciale et des bandes. Je rentrais chez moi revoir le poulain.

Ce dernier était réveillé maintenant et je n’allais pas m’arrêter en si bon chemin. D’accord on avait commencé à créer un lien mais ceci n’était rien. Il fallait maintenant utiliser ce lien afin de le renforcer. Et pour cela. Le seul moyen que je trouvais était le licol. Il avait un peu peur de l’objet lorsqu’un humain le tenait, sûrement qu’il avait peur qu’on le raccroche. Il fallait donc que je lui montre qu’il licol n’était pas que fait pour qu’on l’accroche. J’entrais dans le box et il me regarda sans bouger. Première victoire pour moi. Le licol était à côté et je m’en saisis. Je préférais prendre celui qu’il connaissait bien, bien que ce dernier fusse un peu détruit. Je m’approchais et la réaction fut quelques pas en arrière. Je m’arrêtais donc, lâchais le licol et m’avançais sans. Il m’accepta. Je le massais un peu, lui donnais un bout de carotte puis repris le licol et m’avançais à nouveau avec. Même réaction. Nous rejouâmes cette petite scène quelques fois encore jusqu’à ce qu’il m’accepte avec le licol. Je le passais juste sur tout son corps. Le contact du tissu contre sa peau mais aussi contre sa tête. Je le passais, il ne dit rien, je l’enlevais immédiatement et le récompensais de grandes caresses. C’était tout pour aujourd’hui. J’avais déjà bien avancé, j’avais réussis à poser le licol contre sa tête sans qu’il ne dise rien. Une deuxième victoire dans la journée.

Je le laissais tranquille le reste de la journée, lui offrant deux heures au pré avec le stratagème de la veille. J’en profitais pour me mettre à jour dans mon boulot et pour l’observer dans le pré. Puis le soir, je le rentrais dans son box et lui redonnais une nouvelle fois sa ration. Je l’embrassais doucement sur le nez avant de m’en aller.

Nouveau matin, nouvelle journée de boulot. Mais aussi nouvelle journée avec Dream. Les deux choses les plus importantes pour moi. Je sortis de mon lit difficilement, j’avais mal au dos, sûrement le contre coup d’être restée toute la journée accroupie avec le poulain. Je n’étais pas si vielle pourtant. Enfin je ne pensais pas l’être. Je sortis dans la cour pour voir le poulain paisiblement endormi. Il était allongé, signe qu’il commençait à prendre confiance et qu’il se sentait en sécurité dans l’écurie. Je ne le regardais pas plus longtemps de peur de le réveiller. Dans la réserve je fis à nouveau la mélasse. Je n’avais pas vérifié s’il avait mangé, je pense que je lui faisais assez confiance sur ça. Car oui, la confiance est un sentiment qui se partage. Une fois la mélasse finie, je retournais au box où Dream était déjà réveillé. Sûrement m’avait il entendu préparer. Je remplaçai le seau et constatait qu’il avait plus mangé que les dernières fois. Oui Dream commençait vraiment à se faire à l’écurie et à moi. Je le caressai doucement et il se laissa faire. Par contre il se montrait toujours méfiant et ne toucha pas à sa ration. Sûrement à cause de ma présence. Je le caressai encore doucement puis comme tous les matins, retournais manger et me préparer. Une fois prête, je passai encore dans son box. Je le massai quelques minutes, puis pris le licol. Il ne bougea pas beaucoup, reculant de deux-trois pas seulement alors que je le glissai sur sa tête. Je l’y laissai un peu plus longtemps que la dernière fois et lorsqu’il commença à s’agiter je l’enlevai et je le massai. Je lui donnai un bout de carotte et m’en allai.

Je rentrai du travail plus tôt que d’habitude. Le vétérinaire devait passer aujourd’hui voir le poulain et j’avais prévu d’être là plus tôt afin de le garder calme. J’entrai donc dans le box et le massai. Au passage je remarquai qu’il était quand même de plus en plus sale mais je n’osai pas encore le brosser, il acceptait à peine le licol et c’était déjà un progrès. Alors qu’il s’endormait à peu près, un bruit de moteur surgit, le réveillant complètement. Bien qu’il commençait à bouger et à s’énerver, je ne bougeai pas et continuai à le masser comme si de rien n’était. La voiture s’arrêta enfin dans la cour et c’est à ce moment que je lâchai le poulain. Je saluai le vétérinaire qui avait prit la peine de venir pour moi et pour le poulain. Je lui offrais un café tant dis que le poulain se calmait. Il n’avait sûrement pas entendu de voiture depuis un moment et il fallait qu’il se calme. Après quelques minutes à discuter ensemble, nous retournâmes voir le poulain. J’entrai dans le box en premier et le caressai doucement. Le vétérinaire entra à son tour et Dream recula de quelques pas. Le vétérinaire ne bougea plus et je massai le poulain. J’aimais beaucoup le comportement d’Eric qui respectait les chevaux et était passionné. Accroupi, paume tendu, il s’avança vers le poulain que je réconfortais de mon mieux. Dream me regarda et j’en profitai pour caresser son chanfrein. Il ne bougea pas alors que le vétérinaire s’avançait. Il était adorable, calme. Le médecin put donc l’examiner et mettre un peu de crème. Le poulain se raidit lors du contact avec la crème mais voyant qu’il ne se passait rien, il se calma à nouveau. Dream faisait des progrès immense avec les humains à ma grande joie. Une fois le vétérinaire sorti du box, je donnai un bout de carotte à Dream qu’il croqua avidement avant d’attraper ma manche afin d’en avoir un autre. Je le caressai et sortis sans rien lui donner de plus. Je ne voulais pas qu’il devienne comme ces chevaux sans manières avide de friandises. Je raccompagnai le vétérinaire à sa voiture après l’avoir payé. Il m’assura que Dream était en forme, qu’il reprenait du poids et qu’il guérissait à vu d’œil. Il me laissait la crème pour que je l’applique tous les deux jours et s’en alla. Je passai voir le poulain que je caressai un peu avant de lui donner à manger et de m’en aller. J’avais préféré ne pas exagérer aujourd’hui car il avait déjà fait beaucoup d’efforts pour accepter le vétérinaire.

Dernière journée avant le week end. Je me levais avec moins de précipitation et d’angoisse que d’habitude. Je devais sûrement être plus relaxée. Le poulain allait bien et prenait du poids, ses blessures commençaient à être physiquement rétablies et il commençait à vraiment me faire confiance. Jamais je n’aurais pensé que ce serait fait en une semaine. Le caractère curieux du poulain m’aidait vraiment. De plus, il semblait vraiment vouloir me donner une chance. Je sortis de mon lit et pour une fois commençai par prendre une douche. Puis doucement je passai devant son box. J’entrai dedans, le petit cheval était déjà éveillé et m’attendait. Je le caressai doucement puis pris le seau qui était renversé dans le box. Il allait donc falloir commencer à mettre des rations normales vu qu’il mangeait désormais. Dans la réserve, je préparai un mélange moins riche en sucreries que les dernières fois. J’enlevai le foie de morue mais je laissai les carottes et les pommes mélangées à l’avoine. Je déposai le seau dans le box et prodiguai une dernière caresse au poulain qui attendit mon départ pour se jeter sur sa ration. Je pris mon propre petit déjeuné puis retournai dans les écuries avant de partir pour le travail. Il n’avait mangé que la moitié et en me voyant arrivé il s’arrêta. Il ne s’avança pas à la porte du box, il attendait toujours que j’aille vers lui. Je rentrai donc dans sa petite maison sans ménagement et le massai quelques minutes. Avant de partir, je lui mis le licol qu’il accepta sans broncher et je lui laissai en partant. Il fallait vraiment qu’il s’habitue. De plus, il pouvait l’enlever car ce n’en n’était pas un très solide. J’avais fais la moitié du trajet jusqu’à mon travail quand une peur survint en moi. J’avais peur que le laisser ainsi avec le licol ne brise tout ce que nous avions créé et qu’aussi qu’il se blesse avec. Je rentrai vivement à la maison. Le poulain semblait un peu dérangé par le licol mais ne faisait rien de grave. Par sécurité, je l’enlevai, le caressai et m’en allai pour de bon.

Au retour, je mis ma voiture afin de fermer le passage au pré. J’entrai dans le box du loulou et lui mit le licol à nouveau. Il ne broncha pas non plus. Je lui donnai une carotte pour le récompenser et j’ouvris la porte. Le poulain comprit immédiatement. En plus d’être adorable, il était assez intelligent, la première fois avait suffit pour qu’il comprenne que lorsque j’ouvrais la porte il pouvait aller au pré. Il ne fallait pas que je l’habitue ainsi tout de même mais pour le moment je n’avais d’autre choix. Il trotta rapidement jusqu’au pré, fier et heureux, ne faisant plus attention du tout au licol qui était accroché sur son visage. Il brouta un peu d’herbe puis fit un grand galop durant une longueur. Un oiseau l’effraya alors il fit rapidement demi-tour. Une fois tout danger écarté, il recommença à manger après s’être roulé. Je le contemplais encore quelques minutes puis je retournais au box avec une brouette et une fourche. Je le curai complètement puis remis de la paille fraîche. Une fois tout ranger er propre je mis une nouvelle ration. Le soleil tombait sur l’écurie. Je m’avançai vers le pré pour attraper Dream mais au lieu de venir vers moi le coquin s’en alla encore plus loin. Ainsi s’en suivit une séance de jeu pour lui et de patience et d’essoufflement pour moi. Une fois rattrapé, je tirai doucement sur le licol pour le conduire au box. A peine la porte du pré passé, le poulain me bouscula et rentra fièrement au trop au box comme un grand. Je souris et fermai les portes. J’enlevai le licol au poulain puis je me posai dans le box. Je le regardai sans bouger et je conclus que le poulain ne voulait vraiment pas manger tant que j’étais là. Alors je pris des poignées de la ration et les lui tendis. Au départ il refusa puis la faim ou la curiosité prit le dessus et il mangea dans ma main. Je le caressai et le laissai tranquille pour la nuit.

Samedi ! Malgré le samedi il n’y eut pas de grasse matinée pour moi comparé à ma vie avant Dream. Je me levai et passai d’abord au box de Dream. Le petit poulain se leva à mon arrivée et tendit le nez au dessus du box. Cela pour moi signifiait : « manger ! » je rigolai doucement et entrai dans le box. Hors de question de céder à tous ses petits désirs. Je commençai donc par un cheeking. Les blessures ne s’aggravaient pas mais ne se fermaient pas non plus. La poussière sur le corps du poulain ne devait pas améliorer les choses. Il fallait vraiment que je nettoie les plaies avant de mettre de la crème cicatrisante afin d’être sûre qu’il cicatrise bien. Pour ça…. Il fallait que j’enlève les croutes déjà formées. Ma bouche devint sèche et se tordit de douleur. Déjà qu’avec un cheval normal on avait du mal alors avec ce poulain… J’espérais que les croutes s’enlèveraient d’elles-mêmes mais j’avais peur que ce fut trop demandé.

De toute façon, d’abord je devais lui donner à manger. J’allais dans la réserve faire sa ration habituelle que je déposais dans le box avant de m’en aller. Avant de moi-même manger, je vérifiais s’il me restait de la Bétadine ainsi qu’une éponge. Bien sûr, rien. Je pris mon petit déjeuné, me douchai et pris la voiture pour aller à la pharmacie. C’est en faisant cela que je remarquais à quel point le poulain était formidable. Tous les jours il me voyait partir mais restait calme dans son box. Je souris et reportai mon attention sur la route. Oui Dream était extraordinaire. Je payais rapidement les objets dont j’avais besoin et en profitai pour remplir ma réserve d’aromathérapie.

Arrivée à la maison, je décidais de m’atteler directement aux soins, j’aurais ainsi le reste de la journée pour reprendre confiance avec le poulain si besoin. Je remplis un seau d’eau tiède que j’apportais dans le box. J’empêchais Dream de boire dedans, il fallait que l’eau reste propre. Je trempais l’éponge dedans et commençais à nettoyer les plaies. Dream ne bougea pas. Il fit quelques pas sur le côté avec le premier contact qui le surprit puis se laissa faire. Ma main sèche ne cessait de le caresser pour le rassurer et l’encourager dans ce comportement. La Bétadine n’allait pas faire mal non plus alors j’appliquais la solution sans problème non plus, le petit se laissa faire sans rien dire. Quelques croûtes se détachèrent d’elles-mêmes comme je l’espérai mais d’autres non. J’inspirai un grand coup et commençai à gratouiller avec l’éponge et mes ongles. Le contact déplut immédiatement à Dream qui s’écarta brusquement, me faisant tomber au passage. Je l’avais prévu. Une moue désappointée prit place sur mes lèvres. Je devais vraiment le faire même si c’était brusque et que ça me tirait les entrailles de voir le poulain souffrir ainsi. Je me relevais et le massai. Il semblait être effrayé. Je lui murmurai que tout allait bien se passer, que c’était bientôt finit. Puis quand il fut calmé à nouveau, je me remis à la tâche. Je décidai de changer de méthode. Une croute molle s’enlevait bien plus facilement. Alors je nettoyai, encore et encore ses blessures. Les humidifiais. Au bout de quelques minutes se fut facile pour moi d’enlever les croutes sans faire mal à l’animal et j’en souriais de joie.

J’appliquais finalement la crème cicatrisante et massai le poulain. Ensuite je mis le licol. Deuxième partie un peu dure à faire. Pourtant il accepta ce dernier sans rien dire. Je devais maintenant l’habituer à marcher avec. J’accrochais une corde et ouvrit le box. Le poulain trottina vers le pré comme par habitude. Je ne bougeai pas et l’arrêtai. Il fut surpris d’abord pour cet ‘’obstacle’’ et il se cabra histoire de montrer son mécontentement. Il s’arrêta bien sûr et attendit. Je fis quelques pas dans sa direction et il avança à nouveau. Alors je m’arrêtai encore. Je décidais de faire demi-tour dans l’allée. Il était hors de question que le loulou décide de lui-même où il voulait aller et décide de me dépasser. Je marchai donc en tirant un peu sur la corde. Le poulain tira dans l’autre sens. Je me félicitai d’avoir pensé à mettre des gants pour cette ‘’opération’’. Je tirai plus fort. Dream n’était pas méchant et plus que tout il ignorait sa force tant il avait été rabaissé et battu. Il plia donc à mes exigences et fit demi-tour pour me doubler. Un vrai étalon. Une fois qu’il m’eut dépassé je m’arrêtai encore. Nous répétâmes ce petit scénario longtemps avant qu’il ne décide de ma laisser arriver à sa hauteur. Pour le moment c’était encore lui qui décidait où aller et je le laissai faire sachant pertinemment que je pouvais le remettre dans le droit chemin dès que j’en aurais l’envie. Le but premier était de lui faire accepter que j’arrive à sa hauteur et donc qu’il me reconnaisse comme potentiel leader.

Avec mauvaise grâce et par dépits je suppose, il accepta ma présence à son encolure. Je ne pouvais pas encore le dépasser mais c’était pas mal. Il devait sûrement en avoir marre de faire des tours et des tours. Next étape : L’attache. Je fis le nœud à la barre d’attache et m’éloigna de quelques pas. Lorsque je ne fus plus dans son champ de vision le petit poulain s’énerva. Il recula mais voyant qu’il était attaché il rua. Il tira de toutes ses forces, frotta sa tête contre la barre en acier, trépigna, mordit la corde. Il refusait de rester attacher, sûrement que ça lui rappelait des mauvais souvenirs. Et lorsqu’il hennit je craquais. C’était un cri désespéré, un cri d’aide, un cri déchirant. Je m’approchai vite et en me voyant il se calma. Je détachai la corde et rentrai le poulain au box. Là je lui enlevai le licol et le massai longuement. Une fois le poulain calmé, je remis la corde et le licol. Il se laissa faire un peu raidi tout de même. J’essayai de le diriger au pré mais il fallu faire la même chose quelques minutes auparavant car le poulain refusa à nouveau de me laisser le guider et être à sa hauteur. Finalement lorsque nous arrivâmes au pré je le lâchai complètement : j’enlevai même le licol.

Je le laissai se défouler pendant deux bonnes heures puis à nouveau j’eus beaucoup de mal pour aller le rechercher au pré. Dream devenait un poulain plein d’énergie qui avait besoin de se dépenser. C’est pour cette raison que je ne rechignai pas à jouer avec lui. Une fois attrapé, un nouveau calvaire commençait : le rentrer au box car à nouveau Dream ne me laissai pas passer près de lui. Lorsqu’enfin il arriva au box je lui donnai une carotte puis fermai la porte. Le soir tombait déjà sur la ville et l’écurie et je lui donnai sa ration avant de retourner chez moi pour la fin de la soirée et la nuit.

Le réveil sonna et je me levais, en grognant doucement mais bien sûr les chevaux n’attendent pas. On les a domestiqués et nous sommes responsables de ça, cette philosophie des choses était bien ancrée dans ma mémoire. Je mis mes deux pieds à terre, chancelai, d’accord je n’étais pas encore habituée au rythme de vie que m’imposait l’écurie. Nevermind. Reprenant mon équilibre, je descendais de ma chambre pour sortir dans le froid matinal. Pas mordant mais frisquet tout de même. Ca ne faisait qu’une semaine et je me plaignais déjà, pourtant avoir un cheval avait été mon rêve si longtemps. Je pense que j’aurais préféré qu’il soit dans une autre écurie et que je n’eusse à m’occuper de tout cela. Mais bon tricher sur cela faisait de moi une mauvaise cavalière. De plus voir le poulain allongé dans son box, endormit m’emplissait de bonheur, c’était un spectacle que je ne pouvais manquer.

Je préparais en silence la mélasse dans la réserve. Petit à petit je la faisais de moins en moins riche pour l’habituer à nouveau à une alimentation ‘’normale’’, le petit poulain avait bien repris du poids. Je le laissai manger tant dis que moi-même je prenais mon petit déjeuné. Puis je retournais à l’écurie, lavée et habillée. Il avait déjà fini de manger et m’attendait lorsque j’arrivai. Je souris et mis le licol au petit cheval. Il me suivit plus docilement que la veille, peut être avait il comprit la leçon. Je l’attachai à la barre de pansage puis allai à la réserve chercher des brosses. C’est en revenant que je compris mon erreur. Le poulain était terrifié, les yeux allant dans le blanc, l’encolure tendue, le corps en arrière. Il tirait de toutes ses forces. Je courrai vers lui oubliant de ne pas courir près des chevaux. La réaction fut immédiate, me voyant il se propulsa sur le côté et se prit la barre dans le ventre. Je grimaçai sous sa douleur à lui. Je lâchai le sac de brosses et je me mis accroupie. Je tendis la main à plat. Je ne bougeais plus malgré la peine qui me tiraillait. Le coup contre la barre en fer l’avait calmé. Il me regardait sans bouger.

Une éternité passa avant qu’il ne daigne se calmer. Doucement son corps revint droit et perdit son attitude de fuite. Ses yeux ne se révulsaient plus. Il me regardait calmement, suspicieux. Il fit quelques pas pour se décoller de la barre toujours en me défiant du regard. Une fois qu’il eut évalué le danger passé, il secoua de la tête et s’approcha de moi, me reniflant. Je souris de soulagement et respira. J’avais l’impression d’avoir tenu tout mon souffle durant cette épreuve. Il posa son museau contre ma main et je le caressai. Je me relevai tout doucement puis le détachait. Je le fis faire quelques tours dans la cour. Il restait plus ou moins derrière moi. Quand il me dépassait par jeu, je le remettais simplement à sa place. Puis je l’accrochais à nouveau à la barre. Sortit la première brosse. Il ne dit rien du tout au contact avec le bouchon, il se contenta de plier l’encolure pour voir ce que je faisais. J’évitais bien ses cicatrices. Je lui brossai la queue avec plus de difficultés, il ne supportait pas du tout ce que je tienne cette partie de son corps. Cela pouvait se comprendre. Pourtant il se laissa plutôt faire. Il m’étonnait tellement. Je n’essayai pas l’étrille qui pouvait être assez brusque mais j’essayai la brosse douce sur sa tête. Là il n’apprécia pas du tout. Il la tendit vers le haut, bien haut même si j’étais plus grande et il la secoua de toute part. Je posai la brosse et caressa sa tête avec ma main. Il ne dit rien, tendu, il se laissa faire. Je pu passer ma main partout contre sa tête. Je laissai là pour aujourd’hui, enfin pour la tête. Il m’importait de faire la désensibilisation des jambes aujourd’hui.

Je m’accroupis et glissa ma main le long de sa jambe. Il me poussa avec le bout de son nez et j’atterris dans la poussière. Petit coquin. Je souris puis repris ma position. Le voyant venir avec son bout du nez, je repoussai ce dernier, une main toujours présente sur sa jambe. Il comprit et n’essaya pas de me pousse à nouveau. Il me laissa toucher jusqu’au bout ses quatre jambes. Je repris la première et poussai avec mon bassin son épaule. Déséquilibré, il bougea et j’en profitai pour lui tenir la jambe. Il n’apprécia pas du tout. Il essaya de sautiller et finalement arracha son sabot de ma main, évitant de justesse une chute pour lui. Je souris et recommençai mais sans grand succès, à nouveau la même réaction. Je laissai doucement son sabot retomber puis le détacha. Ca suffisait pour aujourd’hui je n’allais pas le brusquer.
Je le mis au pré et m’attaqua au box. Je le curai entièrement et le lava au jet d’eau. Une fois l’eau évaporée, je remis de la paille et retournai cherche le loulou qui… m’attendait à la barrière. S’ennuyait-il ? Je rentrai et il s’en alla au petit trop. Oui il s’ennuyait. Je jouai une bonne demi heure avec lui, à charger, courir, le laisser me charger jusqu’au dernier moment. Il joua le poulain pas content lorsque je le chargeai, bien qu’il résigne toujours. Mauvais perdant ! Exténuée, je m’arrêtai et m’allongea dans l’herbe. Il tourna autour de moi au trop comme pour m’inciter à continuer à jouer avec lui ou comme pour me dire que j’étais la perdante ici. Je m’en fichai un peu j’étais trop fatiguée pour reprendre. Après quelques minutes, je me levai et le pris par le licol pour le rentrer au pré. J’oubliais la corde mais il ne sembla pas s’en faire, ce rapprochement sembla même lui plaire plus car il resta à mes côtés sans rien dire. Je le mis au box et une fois dedans, porte verrouillée, je pris sa jambe à nouveau. Il donna plus rapidement mais l’enleva tout aussi rapidement qu’avant. Tant pis pour ce soir. Je lui donnai sa ration, un bisous et rentrais chez moi.

Comme tous les matins, j’accomplissais le rituel habituel qui consistait en me laver puis faire la ration du loulou qu’il mangeait pendant que je déjeunais. Plus le temps passait et plus Dream était accroché à moi. J’avais appris à le connaître et lui de même. Il mangeait avidement. La confiance qu’il m’accordait m’était indispensable.

Avant d’aller au travail, je passais le voir. La veille j’avais travaillé les pieds (ce qui avait finit en une petite catastrophe) et je voulais approfondir le peu qu’il eut appris. Je rentrais dans le box. Je le caressai un peu partout sur le corps, complètement désensibilisé, il me laissa faire tant que j’évitai de toucher ses blessures encore un peu ouvertes. Je le massai doucement, m’attardant tout de même sur ses jambes. A aucun moment il ne donna le pied mais cela n’était pas le but. Ce massage lui permettait de prendre conscience de son corps. Mes mains qui exerçaient une pression lui permettaient de comprendre tout son corps, de voir sa taille.

Finalement, je travaillai ses jambes. Ma main passa le long de la jambe, jusqu’au paturon mais il ne bougea pas, ne fit rien, il pensait sûrement que ce n’était que la suite du massage. Accroupie, presque à genoux, je le poussai, épaule contre épaule. Ce n’était pas évident car il était vraiment encore très jeune et petit. De plus il ne comprenait pas du tout ce que je voulais faire. Je poussai plus fort et il fut déséquilibré ce qui me permit de prendre sa jambe alors qu’il se déplaçait. Bien sûr Dream n’apprécia pas mais j’avais déjà reposé sa jambe. Je fis alors de même avec toutes les autres jambes. Je l’embrassai, lui donnai une carotte et m’en allai.


A mon retour, Dream m’attendait sagement dans le box. Le voyant ainsi je réalisai qu’il devait s’ennuyer durant ses journées. J’embrassai son bout du nez et lui mit le licol. Avant de le sortir du box, je recommençai mon manège avec ses pieds. Il commençait enfin à s’habitude au contact car il sembla moins déstabilisé qu’avant mais il était très impatient et il chercha rapidement à passer à autre chose. Je le guidai jusqu’au pré, en travaillant la marche derrière moi. Arrivée au pré, je m’arrêtais malgré l’envie pressante du poulain de se défouler. Je le caressai puis enfin le lâchai. Il partit au galop et une fois loin de moi fit quelques coups de cul. Je souris et sorti du pré.

J’arrivai devant le box que je paillai. Je ne pouvais encore le faire avec le poulain dedans car il ne supportait pas la vue d’une fourche, ce qui était vraiment compréhensible. Une fois le box fait, je rangeai le tout à la sellerie et rentrait quelques heures pour finir de travailler. Lorsque je revins au pré, le soleil tombait déjà sur le poulain à la robe noire mais je n’en avais pas fini pour aujourd’hui. Il arriva à moi au trop et je pus facilement mettre le licol. Je l’accrochai à la barre de pansage. J’avais, cette fois, pensé à laisser le matériel de pansage près de la barre. Je passai les brosses sur le corps du poulain qui ne broncha pas le moindre du monde. Il s’était vraiment et facilement habitué à ce contact. Cela m’étonnait presque. Ca devait être un petit précieux aimant être chouchouté.

J’arrivais à l’étape fatidique du curage de sabot. Je soupirais puis m’accroupis. Et je poussai avec l’épaule contre son épaule. Dérangé, il essaya de se dégager et j’en profitais pour attraper son sabot. J’essayai de le garder longtemps dans ma main mais encore une fois, rien n’y fit. Il n’aimait décidément pas qu’on lui prenne les pieds. Il m’arracha son sabot de la main, me faisant tomber au passage. Je fis la moue et m’assis sur le sol. C’est à ce moment que je remarquai les blessures de Dream. J’avais oublié que c’était surtout aux jambes qu’il avait été attaqué. Je compris donc pourquoi il ne supportait pas que je lui prenne les jambes. C’était surtout le fait qu’il ne supportait pas d’avoir une pression contre ses blessures car ma main comprimait cela. Je souris et rentrais le poulain au box. Avec la ration, je pris de la pommade que je badigeonnais sur ses jambes. Je retenterais les sabots une fois ses blessures complètement refermées.

Je rentrai chez moi alors qu’il avalai sa ration.

J’arrivais au niveau de mon poulain. Le jour se levait sur l’écurie. Je le caressai longuement mais l’impatient demandait déjà de quoi manger. Je souris, le caressa encore un peu puis sorti du box. Dans la sellerie je fis sa mélasse et la lui donnai. Je revins quelques minutes après une fois douchée et repue. Le poulain m’attendait, il avait fini. J’entrais dans le box et commençai par jouer avec ses jambes comme les derniers jours. Il me sembla qu’il accepta plus le fait que je lui tripote les jambes. Je le félicitai avec quelques caresses puis lui mit le licol. Ouvrant le box, le poulain chercha à me dépasser. Je n’avais pas mis de longe pour l’habituer à rester à mes côtés. Je tirai avec fermeté vers le sol et il s’arrêta. Je repris donc le chemin vers le pré. Une fois bien dedans je le lâchai enfin. Il s’en alla au galop après une ruade qui m’était visiblement destinée. Quelle fierté !

Je rentrais du travail un peu effrayée. Il faisait très chaud et j’avais peur que le poulain n’eut pas assez d’eau mais si, il avait tout ce dont il avait besoin. Il était allongé sous un arbre, à l’ombre. Lorsque j’arrivai à la barrière, il redressa simplement la tête. J’attendis quelques minutes puis fit mine de partir. Il se leva immédiatement et accouru au trop. Je le caressai et rentrai dans le pré. Je lui donnai une pomme puis cherchai l’embêter un peu encore. D’abord je testai sa manupabilité (mot non français). Je m’amusais à le toucher un peu partout, à masser ses naseaux, à jouer avec sa queue. Il me regarda mais me laissa faire. Au niveau des jambes c’était toujours plus dur mais il semblait accepter de mieux en mieux de se faire toucher à ce niveau là. Je jouais avec ses sabots aussi et il acceptait maintenant que je les garde en main temps que ce n’était pas trop long. Je le félicitais, accrochai une longe à son licol et on alla en balade.

A notre retour, Dream semblait plus heureux que jamais. Il avait le pas et l’œil vif. Il trottina même presque sur place. Je le rentrai au box et le brossa. Il se laissa faire sans broncher. Il n’avait jamais bronché à un pansage. Il semblait même apprécier qu’on s’occupe de lui. Je m’occupais ensuite de ses jambes. Pareille que ce matin, il me les laissa en main et lorsqu’il en avait marre, il enlevait son pied. Il y avait du progrès à faire là-dessus mais en tout cas j’arrivais enfin prendre son pied sans trop de difficultés et à le garder pas mal de temps.

Comme tous les matins je me levais à l’aube avec difficultés. Aux cours des jours ça irait mieux je le savais mais pour le moment c’était toujours une étape difficile du matin. J’arrivais au box et je lui fis un bisou du matin avant d’aller dans la réserve. Il commençait à manquer cruellement de nourriture et je notai dans un coin de ma tête à me faire livrer. Une fois le mélange prêt, je le déposai dans le box du poulain puis allai moi-même me préparer. A mon retour, il mangeait toujours. Je le regardai faire, amoureuse de sa robe noire et de sa petite taille. On aimerait les garder toute notre vie à cet âge là. Il releva la tête, me regardant avec intérêt, attendant sûrement que je bouge. J’ouvris le box et entrepris de masser un peu le poulain. Je déposai un bisou dans sa crinière puis lui mis un licol. Je le conduisis au pré sans vraiment de problème. Dream commençait vraiment à se discipliner. Enfin, ça restait un étalon. Une fois au pré, je l’arrêtai puis le lâchai. Il partit au petit trop. Je vérifiai le niveau de l’eau puis m’en allais, rassurée.

Je rentrai du travail sourire aux lèvres. J’adorais ce moment de la journée. Il n’y avait pas autant de chaleur que durant toute la journée et je retrouvais Dream. J’avançais directement au pré et j’entrais sans simagrées. Il me regarda entrer et me rejoignit au trop. Je le pris dans mes bras et le caressai longuement. Impatient il ne resta qu’un petit moment dans mes bras avant de s’en aller brouter l’herbe plus loin. Je souris puis lui envoyais un ballon. Il joua un peu avec l’objet et avec moi puis je le sortis du pré pour l’attacher à la barre d’attache. Je m’en allai 5minutes pour prendre mon sac de pansage et Dream resta plus ou moins calme. Tellement impatient le petit. Je le brossai et il ne dit rien. Je mis encore un peu de crème cicatrisante sur ses blessures mais bientôt je n’en aurai plus besoin. Je terminai le pansage par lui brosser la queue et la crinière. Il grattait le sol. Oui oui on y va. Je n’avais pas encore fait ses sabots car je venais de remarquer qu’il fallait le remettre au pré. Je le lâchai dans le pré puis m’avançais au niveau de son box.

Armée d’une brouette et de ma fourche je vidais le box de sa paille sale. Avec le jet d’eau je nettoyais le box à fond, le décrassant de tout. Pendant que ça séchait je pris mon téléphone, m’assit dans le pré et appela le fournisseur. Dream jouait près de moi. Je souris. Il n’était plus rien du poulain traumatisé. Le fournisseur me promit d’arriver le lendemain, je raccrochai. Je sortis du pré. Avec cette chaleur, le box était déjà sec. Je le remplis de paille puis retournais voir Dream. Je l’accrochai à la barre de pansage et prit ses sabots que je curais en plusieurs fois. Je le félicitai pour le bon comportement par une grosse pomme. Je le rentrai au box. Pendant qu’il mangeait, je nettoyai la cour de l’écurie puis rentrait chez moi.

Trois ans s’étaient écoulés. Trop ans qui étaient passés plus rapides que l’eau d’un fleuve. J’avais pris l’habitude de m’occuper de Dream, j’avais pris l’habitude de me lever pour lui et si l’on me disait qu’on allait me l’enlever ça aurait été mon pire cauchemar. Trois ans de travail, d’apprentissage, de bonheur. Plus le temps passait, plus je l’aimais, plus je le connaissais. Plus le temps passait, plus le poulain me donnait son amour et sa confiance. Non Dream n’avait plus rien du poulain chétif à l’œil triste et à la robe terne. Ses cicatrices étaient désormais complètement résorbées et il était maintenant plein de vie. Oui il m’en faisait voir de toutes les couleurs mais qu’importe. Je l’avais suivi dans toutes les étapes de sa croissance. Mais il avait grandit trop vite. Ils grandissent tous toujours trop vite. Et aujourd’hui, Dream fêtait ses trois ans.

Je me levais, heureuse. Je sautillais vers l’écurie une pomme dans la main. J’entrais dans le box du poulain, hum pardon du cheval, et lui donnait la pomme en premier. Dream sembla content sans vraiment comprendre pourquoi il gagnait ce présent. Je le massai doucement quelques minutes avant qu’il ne commence à bouger, à se dandiner d’un pied à l’autre, à manger sa paille. Bref. Il avait faim. C’était déjà remarquable qu’il soit à ce point respectueux et qu’il attende que je lui donne à manger de moi-même. C’était très rare. Je sortis du box et pris un seau d’avoine. Au cours des années j’avais réduit sa ration car il avait reprit de la forme. Je posai la ration dans sa mangeoire puis m’en allais moi-même me préparer. A mon retour, l’étalon avait finit de manger. Je lui mis le licol et l’accrochais à la barre de pansage. Là je le brossai d’abord avec l’étrille, enlevant le peu de saletés visible sur sa robe noire puis la poussière fut balayée par le bouchon. Finalement je lustrais sa robe grâce à la brosse douce. Je fis un petit bisou sur ce corps. M’abaissant, je fis ses sabots sans problèmes. Ensuite je peignais sa crinière et sa queue que je tressai. Aujourd’hui le vétérinaire allait venir, voir si le poulain était prêt à être monté, c’était un moment très attendu.

Le poulain prêt, le vétérinaire qui n’arriverait pas avant quelques heures, je décidais de mener Dream au rond de longe. Durant les années passées avec lui, je lui avais appris à faire quelques figures de cirque. Ca nous amusait tous les deux. Pour commencer, nous jouâmes ensemble à se charger puis reculer. Dream semblait adorer ce jeu et il se mettait à fond dedans. Pour ma part, je préférais le faire dans le rond de longe que dans le pré, la superficie étant plus petite, cela me permettait de tenir la course. Je le chargeai, il cabra et fit demi-tour, je le bloquai, il fit une sorte de demi-pirouette pour faire un demi-tour. Il chargea, je chargeait en retour, il s’arrêta et reprit un galop dans l’autre sens, envoyant une ruade au passage. Au bout de quelques minutes je m’arrêtais, exténuée. Fier, il hochait de la tête, la queue haute au petit trot. Il me rejoignit au centre où je m’étais assise et s’arrêta. Je le câlinai. Puis je me relevais.

Je pris la chambrière et la fit claquer au sol. Dream s’abaissa sur une jambe pliée. Je le félicitais par une caresse. Je levais la chambrière, il se releva et cabra. Lorsqu’il redescendit, à nouveau une friandise. Bon d'accord, il était fort probable que j'étais gaga de ce cheval et que je le gavais trop mais tant pis. Je le couchais, je le relevais, le fit monter sur un plot, le fit ruer. Dream excellait à ces jeux et semblait prendre un vrai plaisir. Je le caressai tant dis que j'entendais des applaudissements. On m'avait épiée. C'était mon vétérinaire. Je souris.

"Il a bien grandit pas vrai ?
-Oui c'est devenu un bon cheval"

Ces quelques mots, des mots basiques qui signifiaient que j'avais fais du bon travail avec le petit poulain. Mon coeur se réchauffa. J'étais heureuse. Je caressai l'encolure du cheval et glissai mes doigts entre ses crins tout en tirant un peu pour démêler. Le vétérinaire me fit signe de sortir et je pris Dream au licol afin de l'inviter à me suivre. Arrivés à la barre de pansage, je gardais le poulain entre mes mains. Plus personne ne dit mot. Le vétérinaire était consciencieux dans son travail et moi en alerte, seul Dream semblait apaisé et calme. L'étalon ne bougea pas de tout l'examen, sauf pour chasser les mouches avec sa queue mais il y en avait peu car j'avais utilisé mon spray anti-mouche. Je jouais avec sa crinière tout en observant le spécialiste.

Il se releva enfin et me sourit. Je contint ma joie. Dream était prêt à être débourré. Il rajouta tout de même qu'il avait quelques séquelles au niveau des tendons à cause de son enfance et qu'il faudrait y veiller. Il serait donc plus sujet aux tendinites et aurait du mal à tenir longtemps en endurance. J'hochais de la tête. Je comprenais. C'était normal. Je le caressai, pensive puis le rentrai au box. Je payais le vétérinaire qui s'en alla presque aussitôt. Je retournais au box puis décidais de lâcher le poulain au pré. L'entraînement ne commencerait que demain et j'avais hâte.

Le soir je décidais de le laisser au frais dans le pré. Je vérifiais le niveau de l'eau et lui donna une ration dans un seau. Il se jeta sur la ration une fois celle-ci déposée. Je le caressai un peu puis allait me coucher.